Histoire du Père-Lachaise

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Un peu d’histoire avant de commencer…
L’histoire que nous connaissons de ce lieu remonte au Moyen Âge. A l’époque, arpenter cette terre c’est traverser un vaste terrain cultivé appartenant sans doute à l’évêque de Paris car le lieu s’appelle «Le Champ L’Evêque».

En 1430, alors que l’enceinte de Charles V situe les limites de Paris à la Bastille, un riche négociant en épices nommé Regnault de Wandonne rachète cette colline. Elle est excentrée et jouit de quelques avantages : un terrain fertile, un air pur et de magnifiques vues sur Paris. Il s’y fera construire une maison de
campagne qu’on imagine somptueuse car le peuple la renomme « La Folie Regnault ».

Au XVII siècle c’est un bout de campagne comme il y en tant autour de Paris,
un coin tranquille entre le village de Charonne et de Belleville. Regnault de Wandonne n’est plus de ce monde depuis bien longtemps, mais sa demeure est encore debout. C’est une femme, une vieille dévote profondément attachée à l’ordre des jésuites de la rue st Antoine qui va sans le savoir changer la destiné des lieux. Elle leur offre ce domaine qui deviendra leur lieu de repos et de convalescence.

Les nouveaux propriétaires se sentent bien ici, excentrés de la capitale ils peuvent venir se détendre loin des tumultes de la ville mais le nom burlesque de « Folie Regnault » reste un petit problème à régler. Au matin du 2
juillet 1652, ils décident donc d’ouvrir au cardinal Mazarin leur maison pour y
montrer à Louis XIV, encore enfant, les combats de la Fronde dans le faubourg
st Antoine. C’est à cet instant qu’ils lui offrirent de donner son nom à la colline.
Devenu le « Mont-Louis » le nouveau nom du domaine est adopté. Mais pour les parisiens le lieu restera « folie Regnault », voire quelques années après « Folie la Chaise » car c’est grâce au révérend père François d’Aix de La Chaise, qui aime venir se reposer ici, que le domaine va connaître un véritable nouvel
essor… (Aujourd’hui les rues de la Folie Regnault et du Mont Louis toutes proches en gardent le souvenir.)

En 1675, le père François d’Aix de La Chaise devient le confesseur de Louis XIV,
de vastes travaux sont alors entrepris pour accueillir plus dignement le directeur de conscience du Roi. Comme le monarque exige une habitation particulière pour son confesseur qu’il affectionne particulièrement, un petit château est érigé et grâce aux largesses royales, le jardin est embelli et agrandi. De nombreux arbres sont plantés, des sources d’eau aménagées, un verger, des
bosquets, des vignes sont plantées. Il faut s’imaginer la beauté du lieu, son calme, et toujours cette vue imprenable sur la capitale. Le père François d’Aix de La Chaise a de l’influence sur le vieux monarque, beaucoup même et rien ne lui résiste ! Le mont Louis devient alors le centre du pouvoir jésuite en France, un lieu où se trament et se dénouent les intrigues de la Cour. Toute la noblesse, le Tiers-état, le clergé, les ambitieux et courtisans en tout genre se pressent ici même pour demander audience au confesseur. Son frère, le comte de La Chaise y organise de grandes fêtes somptueuses.
Le lieu est connu de tous les Parisiens, tellement connu que lorsque bien plus tard quand le « cimetière de l’est » sera inauguré, la population le rebaptisera immédiatement « le cimetière du Père La Chaise » … qui lui est enterré … à l’église Saint-Paul-Saint-Louis.

Le temps passe et les jésuites sont contraints de partir. Chassés par Louis XV et
les autres souverains européens, il est ordonné en 1763 par décision royale d’interdire la Compagnie et de la bannir de France. Tous leurs biens sont vendus et le mont Louis ne fait pas exception. C’est le Baron des Fontaines qui devient le nouveau propriétaire des lieux mais la révolution altère sa fortune et l’entretien d’une maison de villégiature paraît trop dispendieuse. Abandonnée, l’habitation des Jésuites tombe en ruine, le domaine est redécoupé en plusieurs parcelles. La nature reprend ses droits et les magnifiques bosquets et vergés se détériorent peu à peu.

Voici l’état des lieux du Mont Louis au début du XIXeme siècle quand M. Frochot, le préfet du département de la Seine, le repère pour l’emplacement de la nouvelle nécropole de la capitale. Il faut des cimetières modernes et faire table rase du passé. De nouvelles formes d’hygiènes et de salubrité publique inspirées par la philosophie des lumières apparaissent et permettent de réinventer les lieux funéraires.
En plus, Napoléon, encore consul, est soucieux d’affermir son pouvoir sur des institutions jusqu’alors ecclésiastiques. Après une loi qui interdit l’inhumation dans les églises, les couvents et les cimetières intra muros, il déclare que «chaque citoyen a le droit d’être enterré quelle que soit sa race ou sa religion » réglant ainsi le sort des exclus de l’église. Une loi inaugurant les concessions à perpétuités vient même compléter l’innovation. Ce processus de sécularisation va faire de cette nécropole le premier cimetière véritablement moderne et laïc, il ne reste plus qu’à confier les plans à Alexandre Brongniart, à qui l’on doit le
palais de la Bourse de Paris. Le terrain est idéal car il permet à l’architecte de conserver les bosquets et les jardins du révérant François d’Aix de La chaise tout en dessinant de nouvelles allées bordées d’arbres divers. L’idée est de réaliser un véritable jardin à l’anglaise, un parc funéraire, ce sera d’ailleurs le premier grand parc parisien quand le 21 mai 1804 ouvre officiellement le cimetière de l’est, rebaptisé par les parisiens «le cimetière du Père Lachaise ».